Réduction du gaspillage alimentaire : solutions, occasions et retombées
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Il suffit de regarder les chiffres pour se faire une idée de l’ampleur du gaspillage alimentaire. Selon la Food and Drug Administration, il représente 40 % de l’offre alimentaire aux États-Unis1. Les aliments sont également la catégorie que l’on retrouve le plus dans les sites d’enfouissement, puisqu’ils représentent presque un quart des déchets solides municipaux. Le gaspillage alimentaire intervient à toutes les étapes de la chaîne de production et de distribution, à la ferme, dans les installations d’emballage, dans les usines, lors du transport, chez les détaillants et à la maison. En tout, et pour les seuls États-Unis, on recense chaque année jusqu’à 160 milliards de livres d’aliments non consommés et qui pourraient être redirigés vers des communautés défavorisées2.
L’ampleur du gaspillage alimentaire a de quoi donner le vertige. Les entreprises sont heureusement de plus en plus nombreuses à s’attaquer au problème au moyen de solutions innovantes. À l’occasion de la 18e Conférence annuelle sur les marchés agricoles de BMO Marchés des capitaux qui s’est tenue à New York, Doug Morrow a animé une table ronde sur les raisons pouvant expliquer la persistance du phénomène et sur les façons d’y remédier; y ont participé Ryan Begin, chef de la direction et fondateur de Divert, entreprise de Concord, au Massachusetts, dont les technologies et les infrastructures permettent d’optimiser la fraîcheur des aliments, de récupérer les aliments consommables pour les redistribuer et de transformer les déchets alimentaires en énergie renouvelable; Clinton Lewis Jr., chef de la direction d’AgroFresh, entreprise de technologie agricole de Philadelphie qui aide les agriculteurs, les emballeurs et les distributeurs à allonger la durée de conservation des produits frais; et Joelle Salzman, directrice des services financiers chez LOOP Mission, entreprise montréalaise qui contribue à l’économie circulaire en transformant les fruits et légumes qui ne trouvent pas preneur en jus pressés à froid.
Tout, partout, tout le temps
Environ 40 % à 50 % des aliments racines, des fruits et les légumes périssent avant même d’atteindre les consommateurs3. Mais ces derniers ont eux aussi une part de responsabilité. La plupart des produits sont à la fois de saison et locaux, mais les épiceries américaines proposent différentes variétés de pommes toute l’année, ce qui est en soi un problème, selon les participants à la table ronde.
« Tant que les gens voudront pouvoir trouver tous les types de fruits et de légumes toute l’année sur les tablettes, il continuera à y avoir du gaspillage alimentaire », estime Mme Salzman. « Plus les fruits et les légumes viennent de loin, plus il risque d’y avoir des pertes pendant le transport. Et, du point de vue de l’épicerie, cela fait plus d’articles différents à préserver, ce qui augmente également le risque de pertes ».
L’apparence des aliments mène aussi souvent à du gaspillage alimentaire. Les consommateurs refusent souvent d’acheter les produits d’allure imparfaite et pourtant parfaitement comestibles. « C’est essentiellement l’être humain qui est à l’origine du gaspillage alimentaire », estime M. Begin.
L’innovation devrait largement aider à atténuer l’élément humain. AgroFresh, par exemple, produit des pellicules d’origine végétale qui permettent de prolonger la durée de conservation et d’améliorer l’apparence des fruits frais. Le défi, au cours des prochaines années, sera de s’assurer que les innovations soient mises en œuvre sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement.
« Tous les acteurs de la chaîne n’en voient pas toujours l’intérêt », explique M. Lewis. « Il y a des détaillants qui acceptent une certaine proportion de pertes. Vous rapportez des bananes chez vous, elles pourrissent et vous retournez en acheter. Nous sommes certes nombreux à chercher des solutions, mais la motivation est loin d’être uniforme sur le marché. Mais, avec une chaîne d’approvisionnement beaucoup plus intégrée verticalement, lorsque vous avez une vue d’ensemble de toute la chaîne, il y a quelqu’un qui va réfléchir aux avantages pour l’ensemble de l’entreprise et aux pertes financières liées aux pertes alimentaires. Il va aussi y avoir une réflexion sur l’empreinte environnementale et sur le développement durable; on voit d’ailleurs émerger des initiatives qui témoignent d’une réelle volonté de remédier au problème ».
Le temps d’agir
Le gaspillage alimentaire ne date pas d’hier, mais on sent désormais l’urgence de trouver des solutions.
« Les sites d’enfouissement devraient atteindre leur limite de capacité d’ici 17 ans aux États-Unis; en d’autres mots, il va falloir soit en construire d’autres, soit trouver des solutions plus intelligentes », explique M. Begin. En collaboration avec CVS Health, Divert a mis sur pied une plateforme de dons alimentaires qui transforme les aliments non consommés des points de vente de CVS en dons à des communautés défavorisées ou en énergie renouvelable.
Ce sont peut-être les exigences des consommateurs qui finiront par faire pencher la balance. Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à chercher à s’associer à des organisations capables de les aider à atteindre leurs objectifs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). De leur côté, les consommateurs sont de plus en plus informés et exigent des marques qu’elles adoptent des pratiques propices au développement durable. Dans ces conditions, l’élimination du gaspillage alimentaire fait désormais partie intégrante, à l’instar d’autres enjeux environnementaux, des stratégies des marques.
« Les milléniaux et les membres de la génération Z vont vers les marques qui servent une cause et sont prêts à payer 10 % de plus pour ces produits », observe Mme Salzman. « Au cours de la dernière année, nous avons pu observer un changement de comportement chez nos clients directs, soit les détaillants. Pour la première fois, nous observons que les détaillants veulent pouvoir proposer des marques qui les aideront à atteindre leurs propres objectifs de développement durable. Les portes s’ouvrent désormais plus vite pour nous et les détaillants acceptent de nous rencontrer plus tôt que ce que nous pensions, parce que nous sommes au service d’une mission ».
1 U.S. Food & Drug Administration
2 Environmental Defense Fund
3 Food and Agriculture Organization of the United States
Réduction du gaspillage alimentaire : solutions, occasions et retombées
Directeur, Stratégie ESG
M. Morrow s’est joint à l’équipe de recherche sur les actions de BMO Marchés des capitaux en septembre 2020 en quali…
M. Morrow s’est joint à l’équipe de recherche sur les actions de BMO Marchés des capitaux en septembre 2020 en quali…
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Il suffit de regarder les chiffres pour se faire une idée de l’ampleur du gaspillage alimentaire. Selon la Food and Drug Administration, il représente 40 % de l’offre alimentaire aux États-Unis1. Les aliments sont également la catégorie que l’on retrouve le plus dans les sites d’enfouissement, puisqu’ils représentent presque un quart des déchets solides municipaux. Le gaspillage alimentaire intervient à toutes les étapes de la chaîne de production et de distribution, à la ferme, dans les installations d’emballage, dans les usines, lors du transport, chez les détaillants et à la maison. En tout, et pour les seuls États-Unis, on recense chaque année jusqu’à 160 milliards de livres d’aliments non consommés et qui pourraient être redirigés vers des communautés défavorisées2.
L’ampleur du gaspillage alimentaire a de quoi donner le vertige. Les entreprises sont heureusement de plus en plus nombreuses à s’attaquer au problème au moyen de solutions innovantes. À l’occasion de la 18e Conférence annuelle sur les marchés agricoles de BMO Marchés des capitaux qui s’est tenue à New York, Doug Morrow a animé une table ronde sur les raisons pouvant expliquer la persistance du phénomène et sur les façons d’y remédier; y ont participé Ryan Begin, chef de la direction et fondateur de Divert, entreprise de Concord, au Massachusetts, dont les technologies et les infrastructures permettent d’optimiser la fraîcheur des aliments, de récupérer les aliments consommables pour les redistribuer et de transformer les déchets alimentaires en énergie renouvelable; Clinton Lewis Jr., chef de la direction d’AgroFresh, entreprise de technologie agricole de Philadelphie qui aide les agriculteurs, les emballeurs et les distributeurs à allonger la durée de conservation des produits frais; et Joelle Salzman, directrice des services financiers chez LOOP Mission, entreprise montréalaise qui contribue à l’économie circulaire en transformant les fruits et légumes qui ne trouvent pas preneur en jus pressés à froid.
Tout, partout, tout le temps
Environ 40 % à 50 % des aliments racines, des fruits et les légumes périssent avant même d’atteindre les consommateurs3. Mais ces derniers ont eux aussi une part de responsabilité. La plupart des produits sont à la fois de saison et locaux, mais les épiceries américaines proposent différentes variétés de pommes toute l’année, ce qui est en soi un problème, selon les participants à la table ronde.
« Tant que les gens voudront pouvoir trouver tous les types de fruits et de légumes toute l’année sur les tablettes, il continuera à y avoir du gaspillage alimentaire », estime Mme Salzman. « Plus les fruits et les légumes viennent de loin, plus il risque d’y avoir des pertes pendant le transport. Et, du point de vue de l’épicerie, cela fait plus d’articles différents à préserver, ce qui augmente également le risque de pertes ».
L’apparence des aliments mène aussi souvent à du gaspillage alimentaire. Les consommateurs refusent souvent d’acheter les produits d’allure imparfaite et pourtant parfaitement comestibles. « C’est essentiellement l’être humain qui est à l’origine du gaspillage alimentaire », estime M. Begin.
L’innovation devrait largement aider à atténuer l’élément humain. AgroFresh, par exemple, produit des pellicules d’origine végétale qui permettent de prolonger la durée de conservation et d’améliorer l’apparence des fruits frais. Le défi, au cours des prochaines années, sera de s’assurer que les innovations soient mises en œuvre sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement.
« Tous les acteurs de la chaîne n’en voient pas toujours l’intérêt », explique M. Lewis. « Il y a des détaillants qui acceptent une certaine proportion de pertes. Vous rapportez des bananes chez vous, elles pourrissent et vous retournez en acheter. Nous sommes certes nombreux à chercher des solutions, mais la motivation est loin d’être uniforme sur le marché. Mais, avec une chaîne d’approvisionnement beaucoup plus intégrée verticalement, lorsque vous avez une vue d’ensemble de toute la chaîne, il y a quelqu’un qui va réfléchir aux avantages pour l’ensemble de l’entreprise et aux pertes financières liées aux pertes alimentaires. Il va aussi y avoir une réflexion sur l’empreinte environnementale et sur le développement durable; on voit d’ailleurs émerger des initiatives qui témoignent d’une réelle volonté de remédier au problème ».
Le temps d’agir
Le gaspillage alimentaire ne date pas d’hier, mais on sent désormais l’urgence de trouver des solutions.
« Les sites d’enfouissement devraient atteindre leur limite de capacité d’ici 17 ans aux États-Unis; en d’autres mots, il va falloir soit en construire d’autres, soit trouver des solutions plus intelligentes », explique M. Begin. En collaboration avec CVS Health, Divert a mis sur pied une plateforme de dons alimentaires qui transforme les aliments non consommés des points de vente de CVS en dons à des communautés défavorisées ou en énergie renouvelable.
Ce sont peut-être les exigences des consommateurs qui finiront par faire pencher la balance. Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à chercher à s’associer à des organisations capables de les aider à atteindre leurs objectifs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). De leur côté, les consommateurs sont de plus en plus informés et exigent des marques qu’elles adoptent des pratiques propices au développement durable. Dans ces conditions, l’élimination du gaspillage alimentaire fait désormais partie intégrante, à l’instar d’autres enjeux environnementaux, des stratégies des marques.
« Les milléniaux et les membres de la génération Z vont vers les marques qui servent une cause et sont prêts à payer 10 % de plus pour ces produits », observe Mme Salzman. « Au cours de la dernière année, nous avons pu observer un changement de comportement chez nos clients directs, soit les détaillants. Pour la première fois, nous observons que les détaillants veulent pouvoir proposer des marques qui les aideront à atteindre leurs propres objectifs de développement durable. Les portes s’ouvrent désormais plus vite pour nous et les détaillants acceptent de nous rencontrer plus tôt que ce que nous pensions, parce que nous sommes au service d’une mission ».
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