En tant que protectrices de l’épargne-retraite de millions de Canadiens, les caisses de retraite canadiennes visent à assurer la croissance responsable de leurs actifs pour répondre à leurs obligations envers leurs membres.
Les caisses de retraite sont particulièrement bien placées pour offrir un aperçu du risque géopolitique et de la volatilité des marchés mondiaux, compte tenu de leurs stratégies de placement à long terme. Lors de la table ronde intitulée Investir dans l’avenir : affronter l’économie nord-américaine et mondiale tenue lors du troisième Sommet annuel Canada-États-Unis, organisé par BMO et le groupe Eurasia, j’ai animé une discussion avec :
Blake Hutcheson, président et chef de la direction du Régime de retraite des employés municipaux de l’Ontario (OMERS)
Deborah Orida, présidente et chef de la direction de l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public (Investissements PSP)
Jo Taylor, président et chef de la direction du Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario (RREO)
Les dirigeants de ces caisses de retraite, qui, ensemble, supervisent des milliers de milliards de dollars d’actifs, ont parlé de l’état actuel des marchés publics et privés, y compris des risques géopolitiques et économiques, des stratégies de placement, de la répartition de l’actif et des occasions au pays. Voici quelques faits saillants de notre discussion :
Risques géopolitiques et économiques
Si quelqu’un a vu sa part de cycles de marché au cours des décennies où il a travaillé, c’est bien M. Taylor du RREO. C’est peut-être lui qui a le mieux résumé la situation lorsqu’on lui a demandé son avis sur l’état du monde : « Du point de vue du risque géopolitique, la situation est aussi incertaine que je l’ai jamais vue. »
La question qui se pose pour M. Taylor est de savoir si cette incertitude va bientôt disparaître ou si elle représente plutôt un changement structurel. La caisse de retraite évalue constamment si elle atteint le bon équilibre, notamment si les États-Unis sont maintenant plus risqués qu’ils ne l’étaient dans le passé, compte tenu de l’évolution des politiques économiques, a déclaré M. Taylor.
« Il ne s’agit pas nécessairement de dire que nous n’investirons plus aux États-Unis », a-t-il déclaré. « Ce sera toujours une destination populaire, mais je crois que nous essayons toujours de nous assurer d’être rémunérés pour le risque que nous prenons. »
La volatilité est également au cœur des préoccupations d’Orida, à Investissements PSP. « Nous venons tous d’une époque où, en tant qu’investisseurs, nous avons grandement profité de la mondialisation et de la baisse des taux, ce qui nous a tous très bien servis », a-t-elle déclaré.
Pour se protéger contre l’inflation et les hausses et les baisses continues du marché, Investissements PSP maintient actuellement une combinaison d’actifs publics et privés d’environ 50-50. La caisse de retraite détient également environ 40 % de ses actifs aux États-Unis, que Mme Orida décrit comme « le marché le plus vaste et le plus liquide pour les placements, ce que nous ne pouvons pas ignorer ».
M. Hutcheson, d’OMERS, reste également optimiste sur les États-Unis, qui représentent environ la moitié des investissements de la caisse de retraite. « Les États-Unis sont le pays le plus propice aux investissements, surtout à court terme », a-t-il déclaré.
Plus d’occasions de placement au Canada?
Pour ce qui est du Canada, il est encourageant d’entendre tous les participants à la table ronde affirmer que l’engagement du gouvernement fédéral à investir dans des secteurs comme l’infrastructure et la défense a fait du pays un endroit plus attrayant où investir.
Mme Orida a résumé la situation en disant qu’Investissements PSP veut potentiellement augmenter sa part au Canada. « Nous entrevoyons des occasions intéressantes dans des domaines où nous avons de l’expertise, comme l’infrastructure, où nous pouvons trouver de bons investissements pour nos retraités. »
OMERS envisage également d’augmenter ses investissements au Canada. « Il y a un moment où nous ferons beaucoup plus dans ce pays », a déclaré M. Hutcheson, en soulignant que la caisse de retraite explore également des occasions en Europe. « Cela se fera-t-il au détriment des États-Unis? Cela reste à voir. »
M. Hutcheson a ajouté qu’il y a des obstacles qui empêchent OMERS d’investir davantage dans son pays, en particulier dans les projets d’infrastructure fédéraux. « Ce n’est pas un problème de demande, c’est un problème d’offre », a-t-il déclaré, mais il s’attend à ce que cela change. « Il y aura plus d’occasions au cours des quatre prochaines années qu’il n’y en a eu dans les 25 dernières années. »
Perspectives sur les marchés privés
Étant donné que les caisses de retraite canadiennes ont joué un rôle de premier plan dans le passage des actifs privés aux actifs publics, j’ai profité de l’occasion pour demander aux membres du panel où ils voyaient les défis et les occasions dans cette partie du marché.
Investissements PSP investit dans des titres de créance privés depuis 2015, avec des rendements annuels moyens d’environ 12 %, a expliqué Mme Orida. À l’heure actuelle, son équipe voit des occasions dans des domaines tels que les infrastructures, avec des projets de qualité supérieure et à plus long terme qui nécessitent un rôle plus actif par rapport aux actifs financiers de moindre qualité du passé.
Au RREO, M. Taylor a indiqué que la caisse de retraite était active dans les secteurs du crédit privé et des capitaux propres et qu’elle avait une équipe chargée de la croissance du capital-risque qui investissait dans des entreprises en démarrage à rendement élevé, et dont le rendement annuel se situait entre 8 % et 20 %. Le groupe privé, a-t-il ajouté, examine tout, de l’immobilier aux infrastructures en passant par les produits de base, tout en surveillant l’incidence de l’inflation sur divers secteurs.
Toutefois, OMERS est davantage exposé au actifs-investissement, qui représente environ 60 % de ses actifs, a expliqué M. Hutcheson. Les actifs privés diversifiés du portefeuille ont historiquement procuré des rendements stables d’environ 8,7 % au cours des cinq dernières années.
Cette prépondérance des actifs privés ne préoccupe pas OMERS, qui considère sa taille comme un avantage dans ce segment du marché. « Dans un marché difficile, nous sommes les derniers à devoir vendre », a-t-il déclaré.
Évaluation de l’incidence de l’IA
Compte tenu de toute l’attention accordée à l’IA, je souhaitais également explorer comment cette technologie transformait leurs activités.
M. Hutcheson a déclaré avoir récemment rencontré 25 chefs de la direction de ses sociétés de capital-investissement et les avoir interrogés sur les menaces et les occasions liées à l’IA, mais aucune réponse n’était identique, même au sein d’entreprises opérant dans le même secteur.
Mme Orida a déclaré que son équipe utilise des versions privées de l’IA, dans lesquelles elle peut saisir des données et des réponses afin de comprendre son fonctionnement et ses applications possibles.
Le RREO adopte une approche semblable. En plus d’utiliser l’intelligence artificielle pour améliorer la façon dont il sert ses membres, il collabore avec les sociétés de son portefeuille pour trouver des occasions de croissance et repérer les risques. « L’IA fait des gagnants et des perdants, a-t-il déclaré, et notre travail consiste à les aider à se situer davantage dans le premier camp. »
En tant qu’investisseurs transfrontaliers, ces caisses de retraite sont un élément important de l’économie nord-américaine. Pour que nos deux économies continuent de croître ensemble, le capital d’investissement provenant d’investisseurs institutionnels tels que ces gestionnaires d’actifs est crucial.
Notre conversation a montré comment les principales caisses de retraite canadiennes adaptent leurs stratégies pour exceller en cette période de volatilité des marchés mondiaux et de changements technologiques rapides.