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Quel avenir pour le marché des fusions et acquisitions?

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De loin, on pourrait croire que le marché nord-américain des fusions et acquisitions (F&A) est à l’arrêt, les pressions inflationnistes, la hausse des taux d’intérêt et l’incertitude économique étant peu propices à la conclusion d’opérations. Mais il ne faut pas toujours se fier aux apparences.

Malgré les difficultés, on peut penser que le marché des fusions et acquisitions va dans la bonne direction. C’est la conclusion à laquelle en est arrivé Amit Melwani, directeur général au sein du groupe des fusions et acquisitions de BMO Marchés des capitaux, lors de sa présentation sur l’état du marché des F&A, notamment dans le secteur de l’alimentation, des produits de consommation et de la vente au détail, dans le cadre de notre 18e Conférence annuelle sur les marchés agricoles qui s’est tenue récemment à New York. Les marchés semblent clairement avoir commencé à se stabiliser au cours du dernier trimestre. « Les marchés des F&A semblent globalement en meilleure santé », a-t-il indiqué.

Il observe cinq éléments favorables aux fusions et acquisitions dans l’alimentation, les produits de consommation et la vente au détail, soit l’optimisation de portefeuille, la croissance des revenus et des marges, l’intégration verticale, les interventions des actionnaires militants et les besoins de liquidités des entreprises en difficulté.

Abondance de liquidités

« Le volume d’opérations annuel moyen depuis le début de l’année correspond exactement à la moyenne à 10 ans », constate M. Melwani, qui indique toutefois que ce chiffre est peut-être sous-évalué, au vu de la montée en régime qu’il observe actuellement sur le marché. « Les possibilités de progression sont bien réelles ».

En dehors des années records de 2021 et 2022, les montants consacrés aux fusions et acquisitions n’avaient pas connu de telle hausse depuis au moins 2016, et il reste encore beaucoup d’argent disponible. Les entreprises disposent au total d’environ 1 700 milliards de dollars US de liquidités prêtes à être injectées dans des opérations stratégiques.

Le marché du capital-investissement pourrait lui aussi jouer un rôle : il a mobilisé une somme astronomique de 2 000 milliards de dollars au cours des 10 dernières années, et une bonne proportion attend toujours d’être investie. En 2022, les sociétés de capital-investissement disposaient d’environ 800 milliards de dollars US non encore engagés, selon M. Melwani.

Déploiement des liquidités

Les sociétés de capital-investissement sont aujourd’hui plus prudentes. « Elles engagent de plus petites sommes, mais leur nombre d’opérations reste similaire à ce que l’on a pu observer ces dernières années », indique M. Melwani. « Elles s’efforcent d’investir leur argent de manière créative ».

Michael Cippoletti, directeur général et chef - Alimentation, produits de consommation et vente au détail chez BMO Marchés des capitaux, est revenu sur ce point lors d’une table ronde, plus tard au cours de la conférence, et a observé que le capital-investissement était lent à se déployer en l’absence de promoteur pour en déterminer l’échéancier. La réouverture du marché obligataire indique toutefois que les sociétés de capital-investissement sont prêtes à redevenir plus actives sur le marché des fusions-acquisitions.

Les méga-opérations, soit celles qui dépassent le milliard de dollars, n’ont pas pour autant totalement disparu, mais elles se déploient plus lentement, estime M. Melwani.

Des primes pour les opérations stratégiques

Ces dernières années, les promoteurs (les sociétés qui facilitent les opérations au sein du secteur des services financiers) acceptaient de payer des ratios plus élevés, mais la situation a changé récemment, les acheteurs stratégiques étant en mesure de payer davantage pour se rapprocher de leurs propres objectifs. « Ils trouvent désormais des moyens de payer ces ratios plus élevés pour faciliter leur croissance », indique M. Melwani, qui s’appuie sur l’exemple des dépanneurs pour montrer pourquoi il peut être avantageux de payer plus.

« Si l’opération donne lieu à d’importantes synergies, cela diminue beaucoup le ratio d’achat », explique-t-il. Ainsi, dans le cas d’opérations récentes portant sur des dépanneurs, les acheteurs stratégiques anticipent des synergies de coûts comprises entre 50 % et 100 % du BAIIA (bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement) de la cible.

La tendance est globalement à l’achat d’entreprises de grande qualité, mais également à l’agrandissement. Dans les bonnes conditions, les entreprises obtiennent les ratios plus élevés qu’elles recherchent, tandis que d’autres font machine arrière lorsqu’elles n’obtiennent pas la valeur dont elles ont besoin, si elles ont les moyens d’attendre une meilleure offre.

Nouvelles approches en matière de structuration

La hausse des taux d’intérêt compliquant l’accès au crédit, lorsqu’elles ont à structurer une opération, les entreprises déploient des trésors de créativité afin de ne pas avoir à avancer beaucoup d’argent.

Elles ont par exemple recours à des clauses tenant compte des bénéfices futurs. Ces clauses permettent au vendeur d’une entreprise d’obtenir plus d’argent à une date ultérieure si celle-ci atteint certains objectifs financiers. Ce type d’opérations est en hausse de 20 %, ce qui montre que l’on met actuellement davantage l’accent sur la croissance des revenus et sur la rentabilité et que l’on a tourné le dos à l’approche axée sur la croissance à tout prix qui avait prévalu ces dernières années, estime M. Melwani.

Le financement par actions gagne lui aussi du terrain et près d’un quart des opérations sont payées intégralement en actions. Historiquement, la proportion était plutôt comprise entre 5 % et 15 %, précise-t-il.

Montée en puissance des investisseurs militants

Les valorisations ont chuté sur les marchés publics après avoir atteint des sommets en 2021 et le mouvement s’est accompagné d’une hausse marquée des activités de militantisme actionnarial. « Le militantisme devrait être plus important qu’il ne l’a jamais été aux États-Unis », estime M. Melwani.

Les investisseurs militants poussent de plus en plus les entreprises à vendre à des acheteurs stratégiques afin de libérer de la valeur actionnariale, surtout dans le cas des entreprises entrées en bourse au cours des deux dernières années à des cours extrêmement élevés qui ont depuis beaucoup baissé. « Les investisseurs militants sont bien présents et cherchent à faire valoir leurs intérêts ».

Optimisme mesuré

Il ne fait aucun doute que les fusions et acquisitions vont se multiplier, estime M. Melwani. De nombreuses entreprises préparent le terrain et lanceront leur processus de vente dès qu’elles auront le sentiment que le marché est prêt.

« C’est encourageant pour nous : les occasions sont là et des opérations se font », constate-t-il. « Le marché n’est peut-être pas aussi solide qu’il a pu l’être ces deux dernières années, mais il n’est pas défavorable. Il y a de bonnes chances que la situation évolue dans la bonne direction d’ici la fin de l’année ».

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Warren Estey Chef, Banque d’affaires et Fusions
Amit Melwani Managing Director, BMO Capital Markets Mergers & Acquisitions Group

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